Adolescents, courage

Parfois je me sens découragée comme à l'adolescence. Le monde qui nous entoure, parviendrons-nous à le faire évoluer? Les projets que je porte, réussiront-ils à trouver leur chemin vers les gens qui s'y reconnaîtraient? Nous vivons dans un monde incertain...

Ce découragement, je l'ai ressenti souvent à l'adolescence.  D'ailleurs n'est-ce pas un sentiment propre à l'adolescence, qui est justement une période où tout change sans que nous ne puissions rien contrôler, en nous ni autour de nous? Le corps prend des formes nouvelles, que nous attendions vaguement mais qui pourtant nous étonnent voire nous répugnent. Ce que nous adorions enfant, nous le regardons avec ennui. La présence de l'autre devient source de désir ou de répulsion sans que nous sachions très bien pourquoi l'un ou l'autre. La moindre remarque nous fait soit bondir, soit nous enfoncer sous la couette. Nous aimerions transformer le monde mais nos parents nous empêchent tellement de respirer!

Nous ne savons plus dire Oui, et parfois quand nous aimerions dire Non, nous n'y arrivons pas non plus.

Nous, adolescents. Reconnaissez-vous parfois ces élans suivis d'un profond découragement? ces espérances, ces révoltes, qui s'étiolent à force de buter contre un mur?

Je reçois beaucoup de parents désespérés. Parce que leur enfant, en pleine traversée du désert, a du mal à entrevoir la porte qui doit s'ouvrir sur l'âge adulte. Et la verrait-il, cette porte, aurait-il vraiment envie de l'ouvrir?

Quelle promesse faisons-nous à nos ados? "Tu dois travailler à l'école si tu ne veux pas être chômeur... ou faire un métier pénible et sous-payé" - "La vie est dure alors tu dois t'endurcir" - "Ne fais confiance à personne, on ne sait jamais" - "Je te rends ton portable si tu as 15 au prochain devoir de math" - ou "A quoi bon finalement?". Ces discours, je les ai entendus moi aussi. Ils m'ont découragée... J'aurais voulu entendre : "Bien sûr que tu es capable, si tu en as envie". Et puis:

"Écoute ce qui se passe à l'intérieur de toi, c'est intéressant..."

et aussi : "Ouvre-toi au monde, aux autres! même si pour l'instant tu as l'impression que ça ne sert à rien" - "Là où tu trouves du plaisir, vas-y!" J'aurais voulu entendre ça, non pas parce que c'est la vérité (je n'en sais rien...) mais parce que ça fait du bien : ça ouvre l'esprit, ça ouvre le coeur, ça donne envie de vivre. Les ados n'ont pas besoin d'entendre une vérité, ils vont arriver tout seuls à trouver la leur, si on leur fait confiance.

Surtout, j'aurais aimé entendre des questions : "Qu'est-ce que tu en penses?" - "Qu'est-ce que tu aimerais faire?" sans aucune attente, sans le moindre jugement sur le type de réponse que je devais donner. Je crois que les ados ont besoin de cette confiance qu'on leur donne quand on s'intéresse tout simplement à leur monde intérieur. Je crois que ça m'aurait encouragée. Aujourd'hui encore, quand j'ai envie de baisser les bras, je me sens encouragée si un.e ami.e me pose quelques bonnes questions... Parfois j'arrive à être cette amie pour moi-même! C'est peut-être simplement ce qui me distingue de l'adolescente que j'étais: aujourd'hui, je peux exercer une curiosité bienveillante envers moi-même, et retrouver le courage de vivre.