Stress et parentalité chez les mammifères

11/10/2023

D'abord l'émerveillement, puis le choc. Ensuite la réflexion. Le splendide documentaire de David Attenborough, Our planet (Notre planète), me frappe par les similitudes que je reconnais entre le comportement maternel des animaux et celui des humains. 

Sur la banquise et surtout dans l'eau, une maman ourse trimballe ses deux petits en quête de nourriture. Elle est affamée, en survie. La banquise fond, l'obligeant à se déplacer à la nage, ce qui est beaucoup plus long et fatigant pour les ours, sans compter qu'ils sont moins habiles dans l'eau et qu'ils rentrent plus souvent bredouilles de la chasse. Donc, maman ourse affamée parcourt ce territoire de plus en plus aquatique, de plus en plus hostile, sans relâche, et les petits courent derrière elle. Le plus faible des deux galère pour grimper sur les rochers, arrive trop tard pour profiter de la proie que sa mère a déjà dévorée, et doit repartir à l'eau le ventre vide. S'il n'arrive pas à suivre sa mère, il ne survivra pas.

Notre imaginaire humain est nourri d'histoires de parents qui se sacrifient pour que leurs enfants puissent manger. Ce n'est pas seulement une légende d'ailleurs, j'ai reçu plusieurs fois des mères qui me disaient « je ne mange pas, je laisse ce que j'ai à mes enfants ». Pourtant il existe aussi des parents qui, en situation de précarité, sont trop stressés, trop préoccupés par la survie, pour prendre soin de leurs enfants. Comment les en blâmer. L'exemple de cette ourse blanche, reine du règne animal et pourtant si fragilisée par le changement climatique, nous montre à quel point la vie des petits dépend du bien-être des parents. Dans une situation de stress intense, les parents sont moins disponibles : le cortisol et autres hormones du stress prennent le dessus sur l'ocytocine, l'hormone dite « de la tendresse » et les autres hormones liées à la joie. Le "caregiving" est menacé par le mode survie.

Si les ours sont des animaux solitaires, ce n'est pas le cas des humains. Je me sens co-responsable (non seulement de la lutte contre le dérèglement climatique) mais aussi de la solidarité au sein de nos sociétés, solidarité nécessaire à la sécurité affective et psychique des enfants. Le documentariste filme aussi le parcours d'une maman phoque, elle aussi en détresse parce qu'elle doit plonger pour chasser, mais ne peut pas laisser son petit seul sur la banquise, proie facile pour les prédateurs. Épuisés, la mère et son petit tentent de se reposer sur un bout de banquise déjà occupé par une colonie de phoques qui les rejettent brutalement. Les vieux auraient pu accueillir le bébé, le temps pour la mère de rapporter sa pitance… ils auraient ainsi favorisé la survie de leur propre espèce. Je me demande dans quelle mesure ces histoires tragiques sont une métaphore des dangers qui nous guettent : face aux menaces pesant sur le territoire et sur les ressources, choisirons-nous notre survie individuelle ou la solidarité avec les parents et les jeunes générations?

Ce documentaire remarquable est hélas visible uniquement sur netflix, mais pour les abonnés, c'est à ne pas rater : Our Planet